Pierre Pradier
Quick Facts
Biography
Pierre Pradier, né le à Biarritz et mort le , est un médecin humanitaire et un homme politique français.
Biographie
Formation et engagement politique
Pierre Pradier suit sa scolarité à Sarlat, en zone libre, à partir de 1942, au collège et lycée Saint-Joseph dirigé par les Pères de la Compagnie de Jésus.
De son éducation jésuite catholique, il acquiert une exigence d’engagement citoyen dans le champ de l’action publique.
Études de médecine à Paris
Lorsqu’il entreprend ses études de médecine à Paris, en 1950, il est logé au 104 rue de Vaugirard, le foyer étudiant catholique, tenu par les pères maristes, fréquenté avant lui par François Mauriac et François Mitterrand. Il y croise Edouard Balladur qui prépare l’E.N.A.
Engagement contre la guerre d'Algérie par la voie du syndicalisme étudiant
Il adhère au mouvement Jeunesse Étudiante Chrétienne (JEC), association dans la mouvance chrétienne progressiste, fortement impliqué dans la Résistance, pour l’autodétermination du peuple algérien et contre la torture. Ce mouvement associatif, dont la figure de proue est Michel de la Fournière entre 1953 et 1954, constitue un tremplin pour son engagement politique au sein de l'Union Nationale des Étudiants de France, (UNEF), le syndicat étudiant auquel il adhère en 1955.
Il assume la rédaction en chef de l’Étudiant médecin, le journal de l’Association Générale de Paris-Médecine, la branche de l’UNEF des étudiants en médecine. Puis, en 1957, il est élu à la présidence de l’AG Paris-Médecine et à ce titre s’engage activement dans des actions politiques contre la guerre d’Algérie, au sein des « comités de paix » animés par l’UNEF.
Spécialité d'anesthésiste - réanimateur et thèse dirigée par le professeur Henri Laborit
Il choisit la spécialité d’anesthésie réanimation et passe sa thèse sous la direction du Professeur Henri Laborit qui révolutionne l’anesthésie par l’utilisation des neuroleptiques. Pierre Pradier suit cinquante malades pendant un an pour évaluer l’action d’un médicament dont Henri Laborit était l’inventeur. Il obtient son certificat de spécialité d’anesthésiste réanimateur en 1959.
Service militaire en Algérie
Sursitaire jusqu’à la fin de ses études de médecine, il est mobilisé en septembre 1960. Après six semaines de classe à Montauban dans la cinquième section d’infirmerie militaire, il rejoint l’École d’officiers de réserve de Libourne pendant trois mois. Refusant l’insoumission, encore moins de se faire réformer, il choisit de partir effectuer son service militaire en Algérie par devoir républicain, en dépit de son opposition politique active au conflit.
Dès son arrivée le 25 décembre 1960, il est affecté à Ouenza, commune située dans l'extrême est du pays, sur le barrage frontalier avec la Tunisie, au sein d’un régiment d’infanterie motorisée, en unité combattante. Dans le cadre de la « pacification », il pratique son métier de médecin au sein d’un dispensaire d’Assistance Médicale Gratuite (AMG) et reçoit en consultation la population civile locale. Il découvre les caractéristiques de la médecine en pays pauvre : pauvreté des moyens, des équipements, et des stocks de médicaments.
Puis, à partir de février 1961, il rejoint l’hôpital militaire français François Maillot à Alger. Dès le 23 avril 1961, il mène des actions de résistance au putsch des généraux en animant un groupe d’officiers du contingent composé de médecins, de dentistes et de pharmaciens.
Enfin, en juin 1961, il gagne les territoires du sud de l’Algérie, d’abord la base militaire de Ouargla, puis le site d’expérimentation des essais nucléaire français de Reggane. Le rapatriement médical de soldats du contingent irradiés met fin à son service militaire en avril 1962.
Médecin à Bayonne et french doctor
Pierre Pradier obtient un poste d’anesthésiste à l’hôpital de Bayonne où il est parmi les premiers en France à créer un service d'aide médicale d'urgence (SAMU).
En 1968, il s’inscrit au Parti Socialiste Unifié (PSU) de Michel Rocard. Il se présente comme candidat PSU à l’élection législative de 1968 sur la circonscription Bayonne-Biarritz et obtient 3,5 % des voix.
De 1975 à 1979, il rejoint les rangs de l'association Médecins sans frontières, où il mène de nombreuses missions, en Asie et en Amérique du Sud.
Il effectue sa première mission à Beyrouth dans l’enclave chiite en 1975. Puis il participe avec Bernard Kouchner à l’opération « un bateau pour le Vietnam », opération de sauvetage des boat people en Mer de Chine sur le bateau l’Ile de lumière.
Des divergences apparaissent au sein de Médecins sans frontières à l’occasion de cette opération, certains la jugeant trop médiatique, Pierre Pradier quitte l’association pour co-fonder Médecins du Monde avec son confrère et ami Bernard Kouchner en mars 1980.
Missions en Amérique centrale
Comme il y avait eu « un bateau pour le Vietnam », en 1979, il participe à la mission au Salvador « un avion pour le Salvador », organisée par Médecins du Monde. Une guerre civile meurtrière opposait les gouvernements militaires salvadoriens, dominés par des propriétaires terriens et soutenus par les États-Unis à un mouvement politique et armé d’inspiration marxiste, Le Front Farabundo Marti de Libération Nationale (FMLN).
L’association Médecins du Monde décide de soutenir les paysans pauvres qui subissaient pillages, incendies de leurs récoltes et exécutions, pris entre les escadrons de la mort, les milices d’extrême-droite paramilitaires pro-gouvernementales et le FMLN.
Les villages étant dans l’abandon complet en ce qui concerne les structures de soin, les médecins de ville n’étant pas prêts à se rendre dans des zones dangereuses, Médecins du Monde se porte acquéreur d’un terrain de 15 ha et y construit un camp d’accueil pour les populations civiles. Pierre Pradier en prend la responsabilité au sein de l’association et y revient en mission plusieurs fois, tout en conservant son poste à l’hôpital de Bayonne.
Il supervise les soins dispensés auprès de trois à quatre mille personnes. Puis en s’appuyant sur les Jésuites qui dirigeaient l’Université centre américaine (l’UCCA), à la pointe du combat pour la théologie de la libération, Pierre Pradier supervise l’implantation progressive d’unités d’artisanat et de pisciculture pour assurer l’autosubsistance de ces populations.
Il devient le spécialiste de l’Amérique centrale au sein de Médecins du Monde.
Président de Médecins du Monde
En juillet 1979, au lendemain de la chute du dictateur Somoza, il implante Médecins du Monde au Nicaragua où en partenariat avec le ministère de la Santé, il organise la formation de médecins anesthésistes nicaraguayens.
Il conduit de nombreuses missions médicales humanitaires à Djibouti, au Congo, en Tanzanie, en Haïti, au Liban, Laos, Vietnam, Rwanda, Bosnie, Burundi, Arménie, Nicaragua.
À la suite de Bernard Kouchner, il devient président de Médecins du Monde en 1984 et 1985, puis en assurera direction générale de 1992 à 1994.
En 1989, il exerce la médecine comme anesthésiste-réanimateur à Paris au sein du groupe hospitalier de La Pitié-Salpêtrière.
Mission pour l’OMS en territoires occupés par Israël
De 1989 à 1992, sur proposition du Quai d’Orsay, il travaille au sein de l'Organisation Mondiale de la Santé, comme médecin coordinateur de la Santé Publique dans les territoires occupés par Israël. Il est chargé du délicat dossier de la situation sanitaire dans les territoires occupés, Cisjordanie et Gaza, avec les autorités israéliennes comme interlocuteurs et plus particulièrement l’Administration Civile (AC).
En poste à Jérusalem, il établit aisément des liens avec les ONG et associations de secours palestiniennes présentes sur les territoires de Gaza et Cisjordanie, mais les contacts avec les hôpitaux dont les directeurs nommés par l’administration israélienne sont plus difficiles.
Il visite toutes les structures de santé existantes dans ces territoires (dispensaires, centres de soin, hôpitaux, établissements spécialisés, maisons pour enfants, centres de rééducation). Il recense les problèmes rencontrés, établit des demandes à partir de ces informations et les transmet aux autorités israéliennes.
Durant ces visites qui ont duré un an et demi, y compris pendant la première guerre du golfe où Israel était la cible de tirs de roquettes et de SCUD, il constate une pauvreté des équipements de santé, des moyens d’entretien et de maintenance catastrophiques et une insuffisance des crédits accordés à ces institutions sanitaires par les autorités d’occupation israéliennes.
Grâce aux accords d’Oslo en préparation, les responsables sanitaires palestiniens comptaient devenir de véritables acteurs, capables d’intervenir dans l’attribution et la gestion des budgets, et non plus des assistés.
Il propose un programme d’aide sanitaire aux populations palestiniennes, assorti d’un projet de budget de plusieurs dizaines de millions de dollars. Mais devant les lenteurs et l’inaction de l’OMS à débloquer les fonds et à mettre en œuvre le programme dont elle lui a confié la responsabilité, il démissionne.
Persuadé cependant qu'une solution pacifique pouvait être trouvée dans le conflit israélo-palestinien, Pierre Pradier est à l'origine, au moment des accords d'Oslo, d'une grande conférence réunissant des médecins des deux camps, sous l’égide de Médecins du Monde.
Député européen
Fort de ces différentes expériences, Pierre Pradier entreprend de continuer à jouer son rôle de militant de la cause humanitaire dans le monde de la politique. Présenté sur la liste "Énergie radicale" conduite par Bernard Tapie, il est élu député européen en 1994, mandat qu'il exerce jusqu'en 1999.
Le docteur Pradier retrouve ensuite, une nouvelle fois, le monde médical et opérationnel au sein de la Croix-Rouge, où il est chargé des opérations internationales.
Chargé par Élisabeth Guigou, alors ministre de la justice, et Bernard Kouchner, secrétaire d'État à la santé, d'une mission sur la situation sanitaire dans les prisons françaises, il dénonce, en 1999, le véritable "désastre psychiatrique " qui prévaut dans les établissements pénitentiaires.
Ainsi, dans cette mission comme dans toutes celles qu'il a conduites jusqu'alors, ce médecin hors norme a défendu corps et âme les valeurs de l'humanisme.
Il est mort le 25 avril 2003 à son domicile à Biarritz.
Vie privée
Pierre Pradier épouse Danièle Marcé le 6 octobre 1962 avec qui il a eu 3 enfants : Mathilde Pradier (1964), François Pradier (1969) et Miren Pradier (1972).