Marguerite Stern
Quick Facts
Biography
Marguerite Stern, née le , est une militante féministe française. Ancienne FEMEN, elle est à l'origine du mouvement des collages contre les féminicides. Critiquée pour ses prises de position jugées transphobes par une partie des féministes, elle est exclue du mouvement qu'elle a lancé, plusieurs mois après l'avoir déjà quitté et rapporte faire l'objet de harcèlements et de menaces.
Biographie
Famille
Fille d'un agent immobilier et d'une mère agente de laboratoire, Marguerite Stern grandit dans un village en Auvergne.
Activisme FEMEN
Marguerite Stern commence son engagement féministe au sein des FEMEN.
Le 12 février 2013, à la suite de la renonciation du pape Benoit XVI, elle investit, avec sept autres militantes, la cathédrale Notre-Dame de Paris pour faire sonner les cloches nouvellement exposées ; elles sont expulsées par le service d'ordre. Cette action est largement condamnée par la classe politique, et fait l'objet du premier procès français contre les FEMEN. Patrick Jacquin, recteur-archiprêtre de Notre-Dame, porte plainte pour « profanation d'un espace cultuel » et « coups et blessures », et l'AGRIF pour « injures publiques envers les catholiques du fait de leur religion », « exhibition sexuelle », et demande la dissolution des FEMEN. Le 13 septembre 2013, le tribunal de Paris demande le renvoi pour complément d'information, en attente des conclusions de l'enquête. Le 10 septembre 2014, les activistes accusées dans cette affaire sont relaxées par le tribunal correctionnel de Paris. Les trois surveillants de Notre-Dame, accusés d'avoir expulsé avec violences trois militantes, sont condamnés à des amendes avec sursis. Ce jugement a été confirmé lors du procès en appel en 2015.
Le , elle participe en Tunisie avec deux autres activistes à la première action FEMEN dans un pays arabe en soutien à Amina Sboui, détenue pour le port d'un spray lacrymogène et la profanation d'un cimetière, et risquant 2 ans et 6 mois d'emprisonnement. Elles exigent sa libération devant le tribunal de justice de Tunis, le slogan « Breast feed revolution » (« Nourrir la révolution au sein ») peint sur leurs poitrines nues. Elles sont interpellées et détenues durant un mois à la prison de Manouba. Le 12 juin 2013, elles sont condamnées à 4 mois et un jour de prison ferme pour atteinte aux bonnes mœurs et à la pudeur. Cette décision est jugée choquante par les dirigeants de la France et de l'Allemagne, ainsi que par l'Union européenne, qui exhortent le gouvernement tunisien à revoir ses lois concernant la liberté d'expression. Les activistes font appel de ce jugement, et le 26 juin, elles sont condamnées à une peine de même durée mais avec sursis. Elles rentrent en France le 27 juin.
Le 2 juin 2015, elle fait partie de la première action de FEMEN au Maroc, devant la tour Hassan à Rabat, où elle embrasse seins nus une autre activiste. Selon un communiqué, cette action a pour but de « célébrer les droits LGBT et dénoncer l’injustice faite à la communauté homosexuelle au Maroc ». Sept heures après l'action, elles sont arrêtées, interrogées durant six heures, puis expulsées du territoire.
Action FEMEN à Ikea, octobre 2012.
Collage contre les féminicides, janvier 2020.
Collages contre les féminicides
En , elle initie en France des collages contre les féminicides sous forme de brefs slogans notamment à Paris et Marseille. Ses collages sont composés de lettres noires peintes une à une sur des feuilles blanches. Son premier slogan collé est « Depuis que j'ai 13 ans, des hommes commentent mon apparence physique dans la rue ».
En , elle organise son tout premier collage dénonçant un féminicide, celui de Julie Douib. Le , elle initie un collage collectif contre les féminicides. Elle gère le fonctionnement du groupe de Paris et le lancement du mouvement à l'échelle nationale durant un mois, avant de s'en écarter « par souci d’horizontalité et par penchant anarchiste ». Elle continue à coller seule.
De par la simplicité du mode d'action et l'augmentation du nombre de féminicides en France, de nombreux groupes de collages se forment dans les villes, mais également à l'international. Les médias, en France et à l'étranger, s'intéressent au phénomène. Ces collages affichent des slogans qui ont pour but de sensibiliser et de dénoncer l'inaction des pouvoirs publics à agir efficacement contre les violences faites aux femmes. Les messages rendent hommage aux victimes de féminicides. Ils affichent des phrases courtes qui décrivent les circonstances des meurtres ou qui portent une visée générale. Des centaines de messages sont apposés sur des murs, dont des lieux jugés « symboliques » comme des institutions gouvernementales, ou très fréquentés comme des musées. Le mouvement est toujours actif un an après sa création.
En , elle ouvre un squat féministe, dans le 12 arrondissement de Paris, « L'amazone », QG pour les collages, et lieu de création pour femmes. Il est évacué un mois plus tard.
Vie privée
Elle affirme avoir été victime d'injures et d'attouchements de la part de garçons durant trois années pendant sa scolarité. Début 2021, elle déclare avoir subi plusieurs viols au cours de sa vie.
Elle fait une pause de quatre ans dans son activisme, déménageant à Marseille. Elle travaille dans une association d'aide aux mineurs réfugiés durant deux ans, et donne des cours de français dans la jungle de Calais. Son passé militant dévoilé, elle démissionne, puis travaille en tant que surveillante dans deux collèges des quartiers Nord de Marseille, avant de devoir démissionner de nouveau à cause de ses activités militantes. Elle revient à Paris et emménage dans un squat, le Jardin Denfert (61 boulevard Saint-Jacques).
Le , au lendemain d'altercations avec des hommes de son quartier, elle reçoit une balle de 9 mm dans la fenêtre de sa cuisine, en pleine nuit.
Prises de positions et polémiques
Prises de positions contre le port du voile, la prostitution et la pornographie
Dans un article intitulé « J'ai du mal avec le voile et je n'ai pas honte de le dire » publié en 2016 dans Le Plus de L'Obs, Marguerite Stern s'oppose au port du voile. Représentant un féminisme « universaliste », par opposition au féminisme « essentialiste », elle déclare notamment que le voile, comme la prostitution, ne relève pas du libre arbitre. Elle est aussi opposée à la pornographie.
Prises de positions sur la transidentité et accusations de transphobie
Le , après un collage dans la ville de Montpellier appelant à l'inclusion des femmes trans dans le mouvement féministe avec le slogan « des sisters pas des cisTERF » (jeu de mots construit sur « cis » (cisgenre) et « TERF » signifiant « Trans-exclusionary radical feminist » ou « féministe radicale excluant les personnes trans », et slogan pouvant être traduit par « des alliées, pas des transphobes »), elle prend position contre la place devenue trop importante selon elle du militantisme trans dans le mouvement des collages et au sein du féminisme, via Twitter. Elle y affirme notamment qu'être une femme est une question de biologie et que le militantisme des femmes trans, consistant selon elle à réduire les femmes à un ensemble de stéréotypes patriarcaux tels que le maquillage ou les vêtements, est insultant pour ces dernières. Elle nie la qualité de femmes aux personnes assignées hommes à la naissance, affirmant notamment : « De tout temps, les hommes ont tenté de silencier les femmes en faisant taire leurs révoltes. Aujourd'hui, ils le font de l'intérieur en infiltrant nos luttes ». Elle refuse les appellations telles « personnes à vulve ». Ses positions lui vaudront d'être considérée comme « TERF » par les féministes intersectionnelles.
À la suite de ces déclarations, le compte Instagram Collages Féminicides Paris se désolidarise de ses propos : « Les discriminations ont toujours été condamnées […]. On est sur l'exclusion d'une partie des femmes de la lutte, la transphobie n'est pas un débat. » Elle est exclue du mouvement qu'elle a créé, plusieurs mois après l'avoir déjà quitté. Elle est l'objet de nombreuses insultes sur les réseaux sociaux, si bien que le collectif réagit et précise refuser toute « rhétorique de mise à mort ».
En , Marguerite Stern cosigne, aux côtés de Christine Delphy et de Fatiha Agag-Boudjahlat, une tribune rédigée par Pauline Arrighi intitulée « Trans : suffit-il de s'autoproclamer femme pour pouvoir exiger d'être considéré comme telle ? ». Cette tribune, initialement publiée sur le Huffington Post, puis dépubliée par la rédaction qui la qualifie de transphobe, est republiée par Marianne. Le 26 février 2020, plusieurs personnalités et associations signent dans Libération deux tribunes intitulées « Féminisme : le débat sur la place des femmes trans n'a pas lieu d'être » et « À toi ma sœur, mon frère, mon adelphe ». Ces différentes prises de positions cristallisent les dissensions au sein des collages contre les féminicides. Marguerite Stern est harcelée pour ses positions, harcèlement allant jusqu'à des menaces de mort et entraînant une hospitalisation en psychiatrie pour un trouble anxieux généralisé.
En août 2022, elle cosigne avec Dora Moutot une tribune publiée dans Marianne adressée à Élisabeth Borne, dans laquelle elles s'opposent à une affiche du Planning familial représentant un homme enceint, jugeant qu'« elle reprend un vocabulaire utilisé par les militants transactivistes ». Selon Mediapart, le texte est « très majoritairement relayé par des militant·es, organes de presse ou personnalités d’extrême droite ».
Le site Arrêt sur images rapporte alors que le femellisme, mouvement lancé par Dora Moutot et Marguerite Stern, est rejeté par de nombreuses féministes « pour sa transphobie ». Selon la journaliste, le mouvement adhère à la théorie du complot sur le « financement du lobby trans » et reste proche d'une idéologie ultraconservatrice ou d'extrême droite. Les deux militantes rejettent dans un droit de réponse toute accusation de transphobie et de rapprochement avec l'extrême droite ou le fascisme. Elles précisent que selon elles, le femellisme est avant tout une lutte « contre les oppressions que subissent les femmes en raison de leur sexe ». Libération reproche aux deux militantes des passerelles idéologiques et des obsessions communes avec les militants de La Manif pour tous et l'extrême droite.
Dora Moutot et Marguerite Stern sont reçues peu après par les députées LREM Caroline Yadan et Aurore Bergé, ce qui entraîne les protestations de deux autres élus LREM, Pierre Karleskind et Raphaël Gérard, ce dernier dénonçant de la part de Caroline Yadan un « vocabulaire qui fait écho aux discours haineux entendus en Pologne ou en Hongrie ».
Interrogée en septembre 2022 par Libération, Marguerite Stern se défend d'être transphobe, expliquant : « Je ne suis pas transphobe parce que je dis qu'une femme trans est un homme et je ne combats pas les trans mais l'idéologie trans. De la même manière que je ne suis pas islamophobe parce que je dis que l’islam c’est de la merde, ni antisémite parce que je dis que la religion juive c’est de la merde, ni “communistophobe” parce que je dis que le communisme c’est de la merde ».
En avril 2023, sa venue à Nantes, au colloque annuel organisé par Comité Laïcité République Pays de la Loire au château des ducs de Bretagne, pour une conférence intitulée « Cinq ans après #MeToo, où en est le féminisme ? » est annulée du fait de menaces.
En , Marguerite Stern s'oppose à l'amendement de LFI proposant qu'une femme transgenre puisse être incarcérée dans une prison pour femmes.
Œuvres
Essais
- FEMEN, Manifeste FEMEN, éditions Utopia, 2014
- Héroïnes de la rue, Manifeste pour un féminisme de combat, éditions Michel Lafon, 2020
Podcasts
- Conversations avec Marie, mars 2019
- Héroïnes de la rue, avril 2019
- Le dernier homme, avril 2021
- Écoutez les survivantes, juin 2021
- Ma fortune, mars 2022
- Au peuple des femmes, mai 2022