Charles Goujon
Quick Facts
Biography
Charles Goujon, né le à Saint-Cloud (à l’époque en Seine-et-Oise, actuellement dans les Hauts-de-Seine), et mort en service aérien commandé le au Bourget (Seine-Saint-Denis) est un aviateur français, pilote de guerre durant la Seconde Guerre mondiale, puis pilote d'essai après-guerre.
Biographie
Jeunesse et formation
Charles Goujon grandit dans une famille aisée de Saint-Cloud. Son père est industriel. A dix ans et demi, il devient le plus jeune conducteur de France, car à l'époque, il n'y a pas de limite d'âge pour le permis.
Il pilote une motocyclette baptisée « Cyclette », produite par la firme de son père. A onze ans, il gagne une course réputée, la Course de côte de Gometz-le-Châtel, une compétition ouverte aux sportifs de tous âges.
Il fait ses études secondaires au Lycée Janson-de-Sailly, puis en Normandie et enfin au lycée Pasteur. Il y acquiert une réputation de chahuteur et de cabochard indiscipliné qu’il gardera toute sa vie.
Cependant il réussit son baccalauréat puis entre à l'École Technique d'Aéronautique et de Construction Automobile (E.T.A.C.A,) dont il sort avec le titre d'ingénieur en 1931.
Il hésite sur le choix de sa carrière, entre l'automobile et l'aviation. Ayant fait son baptême de l'air au Bourget en 1932, il opte pour l’aviation. Sur les conseils de Robert Morane, il s’engage dans l'armée pour suivre la formation de pilote.
Carrière militaire
Charles Goujon s’engage donc pour cinq ans dans l’aviation en 1933. Il débute à Istres comme élève pilote, puis rejoint l’école de la chasse à Cazaux, et se perfectionner en « acrobatie aérienne » à Étampes. Breveté pilote de chasse, il rejoint la 2ème escadre, puis la 6ème. En 1938, il remporte le concours de tir inter-armes.
Seconde Guerre mondiale
La menace de guerre ne lui ayant pas permis de quitter l'armée au terme de son contrat de cinq ans, il se retrouve en escadrille de chasse.
Dès le début des hostilités, aux commandes d'un Morane-Saulnier MS.406, il a l’occasion d'attaquer un Heinkel et sera crédité de sa première victoire, juste avant d’être touché à son tour et de devoir sauter en parachute pour la seconde fois de sa carrière.
Dès le lendemain, il reprend sa place en escadrille, et s'octroie une seconde victoire. Pour la seconde fois il est touché par des tirs ennemis et doit se poser en catastrophe.
Après la bataille de France il est affecté en Afrique française du Nord (AFN) au groupe de chasse 2/5 « La Fayette » commandé par Constantin Rozanoff, autre futur célèbre pilote d'essai, puis au groupe 3/6 « Roussillon ». Il finit la guerre comme capitaine, avec quatre victoires homologuées et trois probables, obtenues en 193 missions et 283 heures de vol de guerre. Il aura piloté des chasseurs aussi divers que le Morane-Saulnier MS.406, le Dewoitine D.520, le Bell P-39 Airacobra, le Curtiss P-40 Warhawk et le Republic P-47 Thunderbolt.
Pilote d’essai
Avions à hélice
Charles Goujon n’est pas seulement un brillant pilote de chasse : dès octobre 1940 il a obtenu son brevet de pilote de transport public.
En juin 1946, il est embauché chez Morane-Saulnier à Villacoublay. Pendant plusieurs mois, il commence par réceptionner des Fieseler « Storch », dont la production se poursuit après-guerre sous l'appellation de Morane-Saulnier MS.500. Ensuite il présente des prototypes de tourisme, notamment le quadriplace MS.571. Il dirige ensuite l’école de pilotage de Morane-Saulnier.
En 1947, il obtient sa licence de pilote d'essais (n°117) et entre le à la SNCASO. Dès le lendemain, il est aux commandes du bimoteur SO.30 N, second prototype ayant volé après la guerre, en 1945. Cet avion de transport avait été conçu, sous l'Occupation, par l'ingénieur Jean-Charles Parot. Il est chargé de nombreux vols d'essais du SO.30 et de ses dérivés. Pour tenter d’obtenir un contrat de l'Armée de l'Air, la SNCASO a mis au point une version « cargo » de ce bimoteur, le SO.30 C. Malgré les démonstrations de ses possibilités qu’effectue Charles Goujon, l'Armée de l'Air préfère le Nord 2501 « Noratlas ». Goujon avait pourtant fait le maximum pour convaincre des performances de ce bimoteur. Il fit notamment une démonstration spectaculaire le , à la veille de la première présentation en vol clôturant le Salon de l'Aviation : un vol Paris-Bordeaux et retour sans escale (soit 1 000 km), à pleine charge, sur un seul moteur.
Avions à réaction
Le SO.30 fut retenu comme premier appareil expérimental de transport à réaction français. Les deux moteurs Pratt & Whitney de 2 030 ch furent remplacés par deux Rolls-Royce Nene de 2 260 kgp sur le SO.30 « Nene ».qui fit son premier vol le avec « Charlie » Goujon aux commandes, son équipage étant composé deAndré Pérard et Armand Raimbeau. Les essais permirent d'atteindre 700 km/h. Ce même « banc d’essai » volant fut remotorisé avec des SNECMA « Atar » et rebaptisé SO.30 « Atar ». Il vola en janvier 1953. Goujon était à nouveau aux commandes.
Depuis son entrée à la SNCASO, Daniel Rastel avait démissionné et Jacques Guignard l'avait remplacé comme chef pilote. Ce dernier fut arrêté pendant près de six mois pour raison de santé et Goujon assura l'intérim. Cela lui permet de voler enfin sur monoplace à réaction : il prend la place de Jacques Guignard à bord du SO.6000 Triton, le premier avion à réaction français, dessiné par Lucien Servanty.
Il effectue plusieurs vols, en configuration « composite » accroché sur le dos d’un avion-porteur, à bord de la maquette expérimentale SO.M-1. De retour, Jacques Guignard assure les vols libres après décrochement de l’avion-porteur.
Charles Goujon aborde une période intense de sa vie de pilote d’essai en janvier 1953, avec les essais de l'« Espadon ». Le premier vol du SO.6020 « Espadon », effectué par Daniel Rastel, remontait au . Jacques Guignard avait fait voler le SO.6025 au réacteur plus puissant, puis la version SO.6021, et pour finir le SO.6026, dont la puissance du réacteur était optimisée par un moteur-fusée.
En janvier 1953, Goujon effectue son premier vol sur SO.6021 Espadon, version dotée d'un réacteur Hispano-Suiza « Nene » mais ne comportant pas encore de moteur-fusée. Le , un an après Jacques Guignard, il pilote le SO.6025 doté d'un moteur-fusée SEPR et entre dans le « club » très fermé des « pilote-fusées ». Il partage avec Guigard la réalisation d’un programme enthousiasmant, d’où ne sont pas exclues les émotions fortes. Un jour, lors, de l'essai d'un « Espadon » dans la région parisienne, il est victime d’une extinction de son réacteur, mais parvient à le rallumer en vol.
Il continue à partager avec Guignard les essais des « Espadons ». Le , il effectue le premier vol horizontal à mach 1 jamais réalisé en France.
L’épopée du Trident
Jacques Guignard, qui a commencé les essais du SO.9000 Trident-01 le , se blesse gravement le en effectuant le premier vol du prototype n° 02. Charles Goujon se retrouve chef pilote par intérim. C'est à son tour de poursuivre les essais de l’intercepteur conçu par Lucien Servanty. Son premier vol sur le « Trident » a lieu le .
Enfin, le , en milieu d'après-midi sur la piste de Melun-Villaroche, Goujon allume pour la première fois le moteur-fusée pour un premier vol. Il atteint presque la vitesse de décollage, lorsqu'une lampe rouge s'allume, signalant une avarie. Après vérification, les pleins sont complétés et à 18 h Goujon fait une seconde tentative, réussie cette fois. Il monte à 53000 pieds (15900 mètres) puis, après l’extinction des fusées, carburant épuisé, redescend se poser sans encombre
« Charlie » Goujon se méfie toujours d'une panne de fusées au décollage. Il est sur ses gardes et il a raison. Il échappe de justesse à un accident semblable à celui de Guignard, le . La panne se produisant au moment le plus critique, c'est-à-dire lorsque les roues quittent le sol, il franchit de justesse un bouquet d'arbres et revient se poser.
En compensation, Goujon a la joie de réaliser une « première » le : l'allumage en vol des trois chambres du moteur SEPR, délivrant une puissance équivalente à 50 000 ch. Tout se déroule parfaitement, et le « Trident » parvient à une altitude et une vitesse jamais atteintes en France. Leur carburant épuisé, les fusées s'éteignent et l’avion ne vole plus que sur les réacteurs « Viper », dont le « Trident » est équipé à présent.
Le à Melun-Villaroche, Charles Goujon effectue le premier vol du SO.9050 « Trident II », dans sa version proche du futur avion de série, un intercepteur. Il bénéficiait de divers perfectionnements. Il était équipé de deux réacteurs Armstrong Siddeley Viper de 760 kgp et de la nouvelle version du moteur-fusée SEPR à deux chambres de 1 500 kgp unitaires, donc plus puissant.
La SNCASO prévoit de faire du « Trident II » l'avion vedette du Salon de l'aviation 1957. Charles Goujon et Jacques Guignard, rétabli, effectuèrent donc une préparation minutieuse du vol de présentation. La démonstration ne durera que cinq minutes mais doit être le clou du salon.
Le , Charles Goujon décolle pour une nouvelle répétition. Il pique pour un passage rapide, mais ne redresse pas, percute le sol et explose. Charles Goujon, retrouvé toujours sanglé sur son siège, n'a pas eu le temps de s'éjecter.
Il est inhumé à Sceaux dans les Hauts-de-Seine. Il totalisait 5 600 heures de vol.
Distinctions
- Officier de la Légion d'honneur
- Croix de guerre 1939-1945 avec cinq citations
- Médaille militaire
- Médaille de l'Aéronautique
- En 1957, l'Association des Journalistes Professionnels de l’Aéronautique et de l’Espace (AJPAE) lui décerne le prix Icare.
Publications
Charles Goujon, Trident, Editions France Empire,
Bibliographie
- Jacques Noetinger, Rigueur et audace aux essais en vol, Nouvelles Éditions Latines, , 369 p. , p. 172-185
- Bernard Marck, Dictionnaire universel de l'aviation, Tallandier, , 1129 p. , p. 444-445
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